Des cheminots de la SNCF en grève,à Toulouse,le 9 mars 2023. LIONEL BONAVENTURE / AFP C’est un baroud d’honneur contre les dernières conséquences de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire votée en 2018,au début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron et,surtout,contre l’ouverture à la concurrence du rail. Les quatre syndicats de la SNCF appellent à la grève,jeudi 21 novembre,et envisagent un mouvement reconductible à partir du 11 décembre au soir.
La loi de 2018 a certes allégé la SNCF de 35 milliards d’euros de dettes,mais elle a aussi transformé l’Etablissement public industriel et commercial SNCF en société anonyme (SA). Cette SA,détenue à 100 % par l’Etat,est elle-même actionnaire d’une multitude de sociétés,dont Fret SNCF,toutes gérées de manière indépendante.
Pour la CGT,l’UNSA,SUD-Rail et la CFDT,cette « balkanisation » d’un groupe autrefois fort et unifié fragilise sa cohésion et l’engagement sur le terrain. « Nous nous mobilisons pour l’intérêt collectif »,assure Thomas Cavel,secrétaire général de la CFDT-Cheminots.
Ils savent pourtant qu’ils n’obtiendront pas de retour en arrière. Le mouvement de libéralisation s’accélère : le 15 décembre,les cheminots travaillant pour les premières lignes de TER ouvertes à la concurrence seront transférés vers de nouvelles filiales,créées pour l’occasion,y compris quand la SNCF a remporté le marché. Le 1er janvier 2025,ce sont les salariés de Fret SNCF qui seront transférés à deux nouvelles entités.
Aides d’Etat illégales
Cette société de 5 000 cheminots,leader du transport de marchandises sur rails en France,est contrainte de se métamorphoser,non pas à cause de la loi de 2018,mais de la direction de la concurrence de la Commission européenne. Elle lui reproche d’avoir touché 5,3 milliards d’euros d’aides d’Etat illégales,entre 2007 et 2019 et peut l’obliger à les rembourser. Pour éviter cela,l’Etat et la direction du groupe ont décidé d’amputer Fret SNCF de 20 % de son chiffre d’affaires,laissé à ses rivaux,et de la diviser en deux entités au 1er janvier 2025 : Hexafret,4 000 personnes,qui récupérera les activités de fret,et Technis,500 personnes,qui proposera un service d’entretien des locomotives. Le capital de la société qui coiffera ces deux entreprises – Rail Logistics Europe – pourra être ouvert à un actionnaire public ou privé,la SNCF restant majoritaire.« Les 500 personnes,qui ne sont reprises ni par Hexafret ni par Technis,se sont toutes vu proposer une solution au sein du groupe »,insiste la direction de Fret SNCF. Elle assure aussi que,dès 2025,Hexafret aura retrouvé,par croissance interne,le chiffre d’affaires de Fret SNCF. Et qu’elle aura moins de charges à payer puisque c’est la société de tête du groupe SNCF qui financera la surcotisation au régime spécial de retraite des cheminots,soit 12 % de la masse salariale (de 18 millions à 20 millions d’euros chaque année). Hexafret aura ainsi les mêmes conditions que ses concurrents privés.
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